1972, Vertigo
Les albums mythiques de la période « peace and love » produits en France ne sont pas légions. Le pays a cependant bénéficié de l'exil d'artistes grecs qui fuyaient le régime des colonels, tels les membres du groupe Aphrodite's Child. Mythique, ce 666 l'est assurément devenu avec le temps. Il fut néanmoins de gestation douloureuse. Entièrement conçue par le claviériste Vangelis Papathanassiou, cette œuvre inspirée de l'apocalypse selon Saint-Jean a sur le moment été modérément appréciée par ses comparses, plus enclins à suivre la voie confortable d'une musique pop qui leur réussissait plutôt bien jusque là. Même réserve de la part de la maison de disques Mercury, qui n'a consenti à le sortir qu'au bout d'un an en refilant le bébé à sa filiale Vertigo. Il faut dire qu'entre autres audaces, la prestation plus que suggestive d'Irène Papas dans Infinity avait de quoi braquer les bonnes gens. Largement expérimental et résolument d'avant-garde, l'album n'en contient pas moins quelques bijoux comme Babylon, à l'évidence inspiré par le Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band des Beatles, l'idéaliste Loud, Loud, Loud, bien dans la veine de l'époque, le formidable refrain et le solo wah-wah de The Four Horsemen, l'évocation folklorique grecque de The Lamb, l'onirique Aegian Sea, le solo rock et jazz-rock échevelé de The Battle Of The Locusts et de Do It, le lancinant Altamont qui n'est pas sans évoquer Magma, le faux final Hip And Nunc où l'on entend comme des réminiscences de Tommy des Who, et le vrai final Break, à nouveau proche du son des Beatles.
11 avril 2020
Version originale.
Vidéo éditée par Aphrodite's Child.
1972, Vertigo.