1992, 4AD
La musique de Red House Painters exige avant tout de la patience. C'est en effet avec une extrême lenteur que les guitares déploient des arpèges fatigués, parfois désaccordés, parfois striés d'accords dissonants. Une basse économe et une batterie unique dans l'art de claudiquer juste au bord du rythme, s'attachent à ponctuer le chant plus que le tempo. Il faut du temps, donc, pour s'imprégner pleinement de ces six démos quasi-léthargiques qui ont emballé le patron du label 4AD, Ivo Watts-Russell. Du temps, mais aussi un mental d'acier. Car autant prévenir : Mark Kozelek, auteur, compositeur, chanteur et leader du groupe, a le moral qui fuit par les trous de ses chaussettes. Désillusions sentimentales, certitude que les lendemains déchanteront forcément, peur du temps qui change tout en pire... Le seul moment de légèreté – involontaire – vient de ce que l'auditeur franchouillard ayant quelques souvenirs de la grande époque du yé-yé ne peut pas s'empêcher de repérer un petit air de famille entre les textes de Lord Kill the Pain et de Si j'avais un marteau ! Je suis aujourd'hui moins vulnérable que par le passé à cette musique ouvertement cafardeuse, mais cette distanciation permet de mieux en apprécier les qualités intrinsèques, dont une fausse simplicité et une magnifique tristesse.
25 avril 2011
Vidéo clip de 4AD, 1992.
1992, 4AD.