2015, Relapse Records
Je suis loin d'être resté fidèle au rock progressif, qui m'a pourtant forgé – Red de King Crimson, Trespass de Genesis et Relayer de Yes sont mes trois seuls albums de chevet. Ce n'est pas tant que mes goûts aient changé, même si la curiosité ou l'humeur m'amènent aussi à arpenter et apprécier d'autres genres, mais ce sont les artistes eux-mêmes qui ont évolué, soit vers du plus revêche (King Crimson dans sa dernière époque), soit vers du délayage facile et terne (Genesis, Yes). Tout cela pour dire qu'après l'avoir longtemps délaissé, je tente de reprendre pied dans cet univers. Ce qui ne va pas sans une sacrée dose d'abnégation car ce courant n'échappe pas plus que les autres à une production pléthorique et le plus souvent fort discutable : il en faut des heures d'écoute de choses tout juste passables avant de tomber sur un groupe comme Goblin Rebirth. Je ne connaissais pas son ancêtre Goblin tout court, bien qu'il ait existé à la grande époque des années 1970, mais cette résurrection (parmi d'autres) orchestrée par son bassiste originel et l'un de ses batteurs s'avère de haute volée. Patiemment enregistré chez les uns et les autres, mixé avec soin par le bassiste, leur album essentiellement instrumental renoue avec les constructions complexes, les mesures à cinq, sept ou neuf temps, les solos mélodiques de guitare, les grands vents des synthés et une section rythmique à la fois alambiquée et précise. Cela n'égale pas mes albums fétiches, mais ces Italiens s'y entendent pour porter avec brio les couleurs du genre, envers et contre tout le mépris largement conformiste qu'il subit depuis son apparition. Il manque toutefois, à mon humble avis, le grain d'audace ou le trait d'inspiration qui graverait à jamais leurs morceaux dans l'esprit des auditeurs.
24 décembre 2022
Rome (Italie), 23 juillet 2020.
Vidéo éditée par Guido Bellachioma.
2015, Relapse Records.