1991, Creation Records
La renommée de cet album, sacré pierre fondatrice du rock bruitiste, n'a d'égale que la difficulté de sa conception. Parfois éprouvante (To Here Knows When), parfois hypnotique (Only Shallow), son écoute ne saurait laisser indifférent. Sa quintessence en est le déferlement ininterrompu des guitares, reléguant aux simples utilités basse, batterie et chant. Du reste, Loveless est non l'œuvre du groupe My Bloody Valentine, mais de son intransigeant et maniaque guitariste Kevin Shields, qui a quasiment tout fait lui-même, en dépit du nombre impressionnant de nerfs sur lesquels il a tapé – pas moins de seize ingénieurs du son et toute la maison de disques Creation Records ont juré, mais un peu tard, qu'on ne les y prendrait plus. Toujours est-il que la nouveauté et l'originalité de ce mur sonore à six cordes résident dans la minutie avec laquelle il est assemblé et poli jusqu'au grain le plus fin, dans ce qui ressemble fort à une quête du bruit parfait. Ma sensibilité plus mélodique y trouve malgré tout de quoi se satisfaire dans les morceaux chantés, qui mettent un peu d'harmonie dans ce chaos savamment orchestré (Only Shallow, Sometimes, Come In Alone, Blown A Wish). Certes, les ventes sont loin d'avoir été à la hauteur des dithyrambes de la critique, mais trente ans après, cet album n'en reste pas moins un de ces monuments d'audace et d'inconscience qui jalonnent les évolutions majeures du rock.
27 novembre 2021
Londres (Angleterre, Royaume-Uni) le 15 décembre 1991.
Vidéo éditée par spaced81.
1991, Creation Records.