1995, Island Records
Ce premier album véritablement conçu en solo par Polly Jean Harvey a rencontré un grand succès critique et commercial – avec le fort soutien promotionnel d'Island il est vrai. Son approche est pourtant peu amène, voire rugueuse : c'est un rock minimaliste, venant des tripes et s'adressant aux tripes. Les chansons s'adossent à une simple ligne de guitare ou de basse le plus souvent, à peine rehaussée d'un accord sourd à l'orgue ou de quelques cordes parfois, d'un ou deux accords complémentaires de guitare et d'une batterie discrète. Le chant domine donc, oscillant selon les titres entre chaleur et murmure inquiétant, mais toujours prenant. Pour tout dire, ce format est idéal pour qui a le don d'écriture et d'expression vocale : l'ossature des chansons parle d'elle-même et laisse le devant de la scène à la voix et à l'émotion qu'elle exprime. C'est ainsi que Leonard Cohen mettait à nu les sentiments et que Jeff Buckley, dans un style proche de celui de ce To Bring You My Love, avait conquis le monde par sa reprise d'Hallelujah. Polly Jean Harvey réunit elle aussi ces talents d'écrire et de transmettre sa sensibilité. Les titres To Bring You My Love, Working For The Man, Long Snake Moan, I Think I'm A Mother ou Send His Love To Me sont tout simplement magistraux. Quant à Teclo, dont la mélodie du refrain reprend sur une autre harmonie celle de Her Eyes Are A Blue Million Miles de Captain Beefheart, sa sobriété pudique n'en révèle que mieux le désarroi de tous ceux qui perdent un être cher.
12 décembre 2020
Sydney (Australie), 25 janvier 2003.
Vidéo éditée par 22caroline.
1995, Island Records.