1980, 415 Records
Il faut une sacrée dose d'inconscience pour s'attaquer à l'ordre établi. C'est pourtant ce qu'a osé Scott Ryser à la fin des années 1970 en disant « merde aux guitares » et en revoyant totalement son groupe en conséquence pour les remplacer par des synthétiseurs. L'attrait de sa ville San Francisco pour la contre-culture l'y a aidé, certes. Mais dès les premières séquences de High Pressure Days, il est évident que le trio des Units relève parfaitement le défi : ni l'énergie, ni le rythme, ni le boucan ne manquent à leur rock reconstruit, où le digital n'empêche nullement de chanter à tue-tête, de frapper la batterie à tout va et de transpirer autant que les héros de la guitare. Les Américains revisitent ainsi fort intelligemment le blues-rock (Mission, Bugboy), s'en vont pogoter sans complexes sur les terres du punk (Digital Stimulation, Go, Cannibals) ou font monter d'un cran la transe des dance floors (High Pressure Days, Warm Moving Bodies). Outre ses qualités musicales intrinsèques, cet album vaut aussi pour le jalon historique qu'il pose dans l'évolution du rock. Le remplacement de la guitare par le synthé, défriché avec quelques autres groupes, dont Suicide à New York et les Screamers à Los Angeles, sera bien plus tard appelé « synth punk » par le musicien et musicologue Damian Ramsey. Pour autant, les Units auront la vie brève : leur seconde maison de disque tenait absolument à ce qu'ils sonnent « comme Michael Jackson ou Cindy Lauper », se rappelle Scott Ryser (1). Leur manque de coopération s'est soldé par deux autres albums jugés « pas assez commerciaux » et jetés au fond d'un tiroir par leur directeur artistique. Finalement, les époux Scott Ryser et Rachel Webber, piliers du groupe, sont partis faire tout à fait autre chose à New York, en 1984.
17 mars 2023
(1) Interview dans le fanzine Gimmie, 19 mars 2020.
New York (États-Unis), 28 avril 1981.
Vidéo éditée par UNITS.
1980, 415 Records.