1993, Capitol Records
Jeff Martin d'Idaho n'est pas franchement ce que l'on pourrait appeler un joyeux drille. Alors qu'il sort juste d'un très long silence avec l'album Lapse, non pas vraiment léger mais à la tonalité plus nostalgique que cafardeuse, c'est en réécoutant le tout premier album du groupe qu'il a fondé en 1992, alors avec son regretté compère John Berry, que l'on se rappelle combien la déprime lui colle à la peau depuis longtemps. Dans ce Year After Year, les larmes des guitares saturées tombent en crachin ou en averse du début à la fin, au rythme d'un « poum-tchac, poum-poum-tchac » lent, lancinant, désabusé, aussi las de la vie que le chant qui égrène un chapelet de mille cœurs brisés. Ces chansons – God's Green Earth et Gone en particulier – ont déjà le timbre sale et triste qui sera prolongé dans l'album suivant, This Way Out. Il peut arriver que les instruments se mettent en colère (Here To Go, Memorial Day) ou soient pris d'une soudaine envie de beauté (Year After Year), mais cela reste accidentel. Ils se contentent le plus souvent de raser les murs, la tête rentrée dans les épaules, comme s'ils jetaient un dernier regard craintif au monde avant d'aller se pendre.
1er juin 2024
Manitou Springs (Colorado, États-Unis), le 6 juillet 2021.
Vidéo éditée par Ja B.
1993, Capitol Records.