1984, 4AD
Cérébrale, spectrale, ancestrale. Ce sont les trois adjectifs qui me viennent spontanément pour qualifier la musique des morts qui peuvent danser. Ce premier album a encore les racines qui trempent dans la new wave (The Trial, A Passage in Time), peut-être même la cold wave si l'on tient à nuancer finement (The Fatal Impact). Cependant, on y entend aussi des temps beaucoup plus anciens, où le vent du désert soulevait le sable pour l'envoyer frapper la peau des tambours, où la plainte de mystérieuses processions traversait l'air tremblotant d'immenses étendues rocailleuses (Frontier, Musica Eternal). La force de cette musique est l'envoûtement qu'elle crée lorsqu'elle provoque la rencontre de ces influences (Ocean, Threshold). Malgré tout, il est difficile de se départir de la sensation qu'aucun accident ne peut jamais survenir, qu'aucune note ne soit jouée qui n'ait été soigneusement pensée avant. Brendan Perry et Lisa Gerrard font partie de ces artistes qui intellectualisent la démarche créatrice plutôt qu'ils ne se délivrent de leurs émotions par l'art. Aussi la beauté formelle de leur musique reste-t-elle toujours empreinte d'une distance glaciale, voire hautaine.
14 novembre 2009
Version enregistrée pour la radio, extraite du coffret 1981-1998 (2001).
1984, 4AD.