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Musicabrac / Sous les jupes des filles

Le mouvement #MeToo, relayé par #MusicToo dans le milieu musical, brise le silence qui amnistie le sexisme ordinaire et les agressions sexuelles que subissent les femmes.

Photo : #MusicToo France.

Le verbe haut soudainement brandi par les femmes avec le mouvement #MeToo contre les discriminations, harcèlements et violences qu'elles ont à subir de la part de l'autre moitié de l'humanité, n'a pas mis longtemps à gagner la sphère musicale, où le melon surdimensionné des artistes, producteurs, managers et autres n'est pas pour réfréner les ardeurs des machos obsédés par ce qu'il y a sous les jupes des filles (1). « Ce qui a profondément changé, c'est que dorénavant nous savons et exprimons clairement ce que nous n'accepterons plus », a ainsi résumé le collectif #MusicToo France en passant le relais de son impulsion à tout un chacun et à la collectivité.

En Grande-Bretagne, deux musiciens sur trois – dont une immense majorité de femmes – déclarent avoir vécu une discrimination dans leur travail ; dans 58 % des cas, ces discriminations relèvent du harcèlement sexuel. Au Canada francophone, ce sont 56 % des femmes employées dans l'industrie musicale qui ont été confrontées au harcèlement sexuel. Plus généralement, dans le monde nord-américain, le harcèlement sexuel vient en tête des difficultés que les musiciennes mentionnent dans l'exercice de leur métier.

Et en France ? Les rares études disponibles tendent à montrer que les professionnels mâles de la musique se réfrènent davantage : moins d'une femme sur trois (31 %) travaillant dans le secteur dit avoir été victime de harcèlement sexuel. Il est difficile de savoir en l'état des données disponibles si cette « exception culturelle » française est réelle ou non, tout en gardant à l'esprit que même si elle est inférieure à d'autres pays, la proportion de musiciennes harcelées en France est de toute façon inadmissible.

Pour passer du constat à l'action, au-delà de la dénonciation publique et d'une justice encore peu saisie, frapper au porte-monnaie pourrait être un bon moyen de prévention, même s'il n'est pas suffisant. À cet égard, on peut citer la mesure prise par le Centre national de la musique (CNM), qui conditionne désormais ses aides financières à l'adoption et au respect de son protocole de lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles.

14 octobre 2022

(1) Chanson d'Alain Souchon dans l'album C'est déjà ça (1993, Virgin), et titre d'un film français d'Audrey Dana (2014).

Sources : #MusicToo France ; Dignity at work 2: Discrimination in the music sector (Kathryn Williams et Vick Bain, ISM, septembre 2022) ; Les femmes dans l'industrie musicale canadienne francophone (Joëlle Bissonnette pour la fondation Musicaction, mars 2022) ; Be the change : women in music 2022 (étude Midia pour Tunecore et Believe, mai 2022) ; Enquête exploratoire sur la santé et le bien-être dans l'industrie musicale (Cura / GAM, octobre 2019) ; Protocole de lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles (CNM, décembre 2020).

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© René-Luc Bénichou / 2005-2024. Page éditée le 28 janvier 2024.